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La Goutte d'Huile 


Bulletin de liaison de la Confrérie des Chevaliers de l'Olivier du Languedoc-Roussillon

© Copyright 2014 Confrérie des Chevaliers de l'Olivier du Languedoc-Roussillon  - Conception et réalisation Berjal

N ° 10 printemps 2017

(Avec la permission d'imprimer et de diffuser du Grand-Maître de la confrérie)


Editorial


La grippe a frappé le 12 décembre, très fort, avec son cortège de conséquences (bronchite réveillée, grande fatigue, dépression, …). Le surlendemain de la fête de l'olive de Corconne, je me suis alité, dolent. Il m'a fallu plus de huit semaines bien vitaminées pour que s'en aillent la fatigue et la prostration. Il n'y a pas eu de Goutte d'Huile de fin 2016 et ce numéro sera le premier de 2017. Bonne année quand même et bonne Assemblée générale de notre Confrérie, à Aspères le 5 mars prochain ?


Le froid commence à s'en aller et l'huile a été tirée des moulins, les dégustateurs sont partis au Concours général ou s'apprêtent à le faire. Bientôt, les bourgeons à fleurs vont commencer à pointer à l'aisselle des feuilles des rameaux terminaux. Ferons-nous une bonne récolte ? La pollinisation de nos arbres se fera-t-elle correctement ? L'espoir fait vivre et vive nos oliviers !



Raymond Gimilio

Majoral


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Le nom correct des oliviers et des olives


Madame Josiane Ubaud est une occitaniste distinguée, lexicographe et ethnobotaniste en domaine occitan. Elle a publié dans les Annales de la Société d'Horticulture et d'Histoire Naturelle de l'Hérault (SHHNH, volume 155, année 2015) un gros article de 59 pages comportant des photos de variétés de chez nous et plus de 32 tableaux où figurent les noms occitans (graphie classique ou mistralienne), les noms adaptés en français et d'abondantes explications sous forme de remarques et de notes infrapaginales. Comme le disait un grand écrivain français, Albert Camus (pour ne pas le nommer) « à mal nommer les choses, on ajoute au malheur du monde ». Josiane a donné récemment une conférence avec projection d'un diaporama dans les locaux de la SHHNH qui a été suivie par une cinquantaine de passionnés. Pourquoi faut-il revoir ainsi les noms des olives et des oliviers ? Parce que se préparent sur des bases erronées des travaux de dénominations officielles d'oliviers qui ne reposent sur aucune base lexicographique sérieuse.


Après le gros travail d'identification sur bases scientifiques des variétés cultivées en France, originaires de France ou introduites (coordonné par Nathalie Moutier :  2004 et 2011), ce sont 105 variétés d'oliviers (des cultivars) qui ont été ainsi passés à la moulinette de la science et dont les ADN ont été analysés, entre autres critères, en vue de l'identification variétale. Christian Pinatel, André Martre et Jean-Paul Roger ainsi que Bouchaïb Khadari, Jean-François Burgevin, Denis Ollivier et Jacques Artaud ont co-écrit avec Nathalie Moutier ces deux ouvrages. On peut seulement regretter que le travail ait été arrêté après le départ de Nathalie Moutier ainsi que l'arrêt des recherches sur les variétés d'oliviers en France. La Rougette de Pignan est restée en panne d'étude, par exemple ! Dommage ! André Bervillé et Catherine Breton ont coordonné à leur tour un passionnant ouvrage scientifique sur l'Histoire de l'Olivier où pas moins de 21 scientifiques ont disserté dans 14 chapitres sur tout ce qu'on sait actuellement sur les origines de notre arbre sacré. André Bervillé a soulevé récemment le problème de la pollinisation des variétés d'oliviers en France. Une bonne pollinisation est garante d'une meilleure production en tonnage et en qualité d'olives. Or, la dénomination des variétés pollinisatrices est importante depuis qu'on sait que les variétés ont développé des systèmes d'auto-incompatibilité des pollen/pistils et qu'une variété pollinisatrice doit être compatible en allèles S et en synchronisation de floraison.


Revenons à notre lexicographe-occitaniste-ethnobotaniste qui nous dit clairement que la dénomination des olives et des oliviers constituait une « belle bourbouillade », un fatras parfois très fantaisiste, un « mesclum » peu glorieux. Par principe, le nom de l'olive est féminin, l'arbre est du genre masculin. Josiane dénonce des entorses grammaticales et des adaptations malvenues des noms qui viennent de l'occitan, langue latine pourvue d'une grammaire et d'une syntaxe, de genre masculin et féminin. Par exemple, les dénominations « olivier salonenque » ou « olivier aglandau » constituent des monstres grammaticaux ! Pourtant ce sont le lot commun des ouvrages parlant de l'olivier ! Je cite encore : « La Redounale (fém.) [ou redounaou](masc) est particulièrement cultivée dans le canton de Castries. (…) ». « Le (masc.) Corniale (fém.), arbre aux rameaux pendants … » ; « La Grossane (fém.) ou Groussan (masc.) … » ; « La salonenque (fém.) ou Plant de Salon (masc.), Salounen (masc), Salonen (masc.), Saurine (fém.) ; ... n'en jetez plus ! Josiane a passé en revue tous les ouvrages qu'elle a pu trouver. Elle remonte à l'Abbé Couture (1786).


Pourquoi les noms occitans sont-ils la base prépondérante ? La réponse est simple : c'est dans « nostre terraire, aqui », chez nous, au bord de la Méditerrannée, depuis plus de 2.000 ans, que poussent les oliviers et que mûrissent les olives. Pas dans la zone de la langue d'oïl. Les noms occitans sont la source, les noms français sont une adaptation mais ce dernier point n'autorise pas la fantaisie la plus débridée.

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